Des capteurs innovants pour détecter les polluants issus des hydrocarbures dans les eaux souterraines
Les BTEX sont une famille de polluants particulièrement difficiles à détecter. Des chercheurs et chercheuses de l’institut FEMTO-ST et de TotalEnergies ont conçu un capteur qui les détecte dans l’eau, à des concentrations inférieures à 1 ppm. Publiés dans la revue ACS Omega, ces travaux ouvrent la voie à des réseaux de capteurs aussi efficaces que simples à utiliser.
Les BTEX (benzène, toluène, éthylbenzène et xylène) sont des polluants issus des hydrocarbures, présents dans les eaux souterraines à proximité des sites industriels et des stations-service. Classés parmi les substances toxiques, certains d’entre eux sont même reconnus comme cancérogènes. Leur détection rapide et précise est donc essentielle pour préserver les ressources en eau et protéger la santé humaine. Mais les molécules de BTEX sont peu réactives, ce qui les rend difficiles à détecter et encore plus complexes à éliminer. Des chercheurs et chercheuses de l’Institut Franche-Comté électronique mécanique thermique et optique – Sciences et technologies (FEMTO-ST, CNRS/Supmicrotech ENSMM/Université Marie et Louis Pasteur/Université de technologie Belfort-Montbéliard) et de TotalEnergies ont mis au point une nouvelle génération de capteurs capables d’identifier ces polluants à des concentrations de l’ordre du ppm, qui est le seuil légal de présence dans l’eau. Une avancée technologique majeure qui ouvre la voie à une surveillance plus efficace et à des stratégies de dépollution mieux ciblées.
Pour contourner la faible réactivité des BTEX, l’équipe a exploité des interactions supramoléculaires spécifiques aux cycles aromatiques de ces composés. Ces interactions, dites π-hole, sont dues à une répartition inégale des charges électroniques dans les cycles aromatiques. Les scientifiques ont conçu et synthétisé un polymère ayant le défaut de charge inverse, ce qui lui permet, par effet électrostatique, d’accrocher les BTEX. Ce matériau est déposé en couche nanométrique ultra-sélective sur la surface active d’un capteur à ondes élastiques à détection directe. Les scientifiques ont utilisé un substrat de tantalate de lithium, qui est un matériau piézoélectrique à forte permittivité ce qui lui permet de fonctionner sans perte dans l’eau. L’onde élastique de surface propagée sur tantalate de lithium détecte les changements de propriétés physiques du polymère qui a capturé des BTEX, notamment sa masse. La présence de BTEX est mesurée comme un retard sur l’onde rétrodiffusée.
Ces dispositifs, qui ont conduit au dépôt de deux brevets, sont maintenant testés en conditions réelles, directement dans le sous-sol et sur de longues périodes. À terme, le déploiement d’un réseau de capteurs sur des sites industriels pourrait révolutionner la surveillance des eaux souterraines, en offrant une solution fiable et continue pour détecter et prévenir la contamination par les hydrocarbures.

© Frédéric Chérioux
Références
Specific Detection of BTEX Contamination in Water Using a π-Hole-Catching Surface Acoustic Wave Sensor.
Jean-Michel Friedt, Vincent Luzet, Valérie Soumann, Nathalie Nief, Bertrand Segues, Gilles Pucheu, Jean-Sébastien Dehez, John-Richard Ordonez-Varela et Frédéric Chérioux.
ACS Omega, 2025.
https://doi.org/10.1021/acsomega.4c08826