Le collagène, un composant clé de nos tissus enfin décrypté

Résultat scientifique

Le collagène est une protéine essentielle de nos tissus. Il forme un gel à la fois souple et poreux, permettant la circulation des éléments vitaux depuis le sang. Des scientifiques du Laboratoire de systèmes micro-mécatroniques intégrés ont mis au point une technologie sans contact permettant de décrypter certaines de ses propriétés. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Science Advances.

Icône de la cosmétique anti-âge, le collagène est une protéine qui constitue la majorité des tissus1 de notre corps. Si ses effets bénéfiques dans la dynamique et l’élasticité des tissus sont connus, notamment pour la peau, les propriétés physiques du gel de collagène le sont beaucoup moins. Sa contribution aux échanges de fluide, de nutriments et/ou d’organites entre les tissus et les vaisseaux sanguins ou lymphatiques est par exemple mal documentée. Ces flux sont pourtant essentiels pour le maintien de l’homéostasie, c’est-à-dire l’équilibre des fonctions vitales. Notre inéluctable vieillissement ainsi que certaines maladies altèrent la vascularisation et la structure des tissus. Et le collagène, en tant que constituant majoritaire de ces derniers, subit et contribue à ces altérations. La caractérisation des propriétés des gels de cette protéine, qui sont à la fois souple et poreux, pourrait donc avoir des implications majeures pour la bio-ingénierie et le développement de matériaux à même de prévenir ou réfréner le vieillissement tissulaire.

C’est dans cette perspective qu’Aurélien Bancaud, la professeure Matsunaga et leurs collègues du Laboratoire de systèmes micro-mécatroniques intégrés (LIMMS, CNRS/Université de Tokyo) ont développé et breveté une nouvelle technologie simple et sans contact pour la caractérisation dynamique de ces matériaux. Un capteur de pression, placé dans une cavité d'air scellée à la sortie d'un morceau de gel de collagène, permet de mesurer la déformation et l’écoulement de liquide à la suite d’une sollicitation mécanique.

Publiés dans la revue Science Advances, leurs travaux montrent notamment l’importance des pulsations de pression, qui peuvent réguler les flux à travers le collagène. Cette caractérisation inédite pourrait être pertinente dans le contexte sanguin compte tenu des pulsations cardiaques. Par ailleurs, dans le cas des cancers, les auteurs suggèrent que les contraintes mécaniques induites par la croissance des tumeurs pourraient modifier les propriétés poreuses des tissus et contribuer à empêcher le transport des médicaments. À terme, cette technologie ouvre des perspectives pour sonder les propriétés des tissus, comprendre comment les cellules qu’ils contiennent contribuent à ces propriétés et optimiser le transport de médicaments à des fins thérapeutiques. Aurélien Bancaud, désormais au Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes (LAAS-CNRS), envisage même que cette technique prenne une place d’ampleur dans le domaine des organes sur puce.

Le collagène, un composant clé de nos tissus, enfin décrypté
Le panneau de gauche montre le support d’accueil avec un gel de collagène dans la cavité parallélépipédique. © Daniel Alcaide
Le schéma du milieu montre le principe de notre appareil : une pression hydrostatique est appliquée par le bas et le système est fermé par une cavité d’air en haut. Le capteur de pression permet de mesurer l’évolution temporelle de la pression d’air et de remonter aux propriétés du matériaux. © Takashi Ando
Les images à droites sont des simulations numériques par le logiciel COMSOL de la réponse du collagène avec le gradient de pression en haut et la déformation en bas. © Jean Cacheux

Références
Asymmetry of tensile versus compressive elasticity and permeability contributes to the regulation of exchanges in collagen gels
Jean Cacheux, Jose Ordonez-Miranda, Aurélien Bancaud, Laurent Jalabert, Daniel Alcaide, Masahiro Nomura, Yukiko T. Matsunaga.
Science Advances, 2 Aug 2023, Vol 9, Issue 31

https://doi.org/10.1126/sciadv.adf9775
Article consultable sur les bases d’archives ouvertes Arxiv et HAL

  • 1Il existe 4 types de tissu : nerveux, musculaire, épithélial et conjonctif. Tous jouent un rôle dans la protection, le mouvement, ou les échanges des cellules.

Contact

Aurélien Bancaud
Directeur de recherche CNRS au Laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes (LAAS-CNRS)
Communication CNRS Ingénierie