Nanophotonique : les interactions lumière-matière mesurées à l’échelle de la molécule unique

Résultat scientifique

La nanophotonique vise à comprendre et à manipuler l’interaction lumière-matière à l’échelle nanométrique, en particulier avec des émetteurs fluorescents uniques. Des scientifiques ont mis au point une méthode sophistiquée pour mesurer l’intensité de cette interaction, grâce à des molécules uniques utilisées comme sondes. Ces travaux sont publiés dans la revue Light: Science & Application.

Un émetteur fluorescent placé à quelques nanomètres d’une nanostructure va interagir avec elle, ce qui modifie ses caractéristiques d’émission de photons. Or le taux d’émission de photons est un paramètre essentiel pour quantifier cette interaction, en plus d’être un indicateur crucial des performances optiques de tout système nanophotonique. Jusqu’à présent, cette mesure s’obtenait le plus souvent sous la forme d’une réponse globale par plusieurs émetteurs, par exemple des molécules, ou par des méthodes qui perturbent l’interaction avec la nanostructure. Des chercheuses et chercheurs de l’Institut Langevin (CNRS/ESPCI Paris) et de l’Imperial College London (Royaume-Uni) ont utilisé une nouvelle méthode pour cartographier le taux de photons émis par une molécule unique, localisée dans l’espace avec une précision de la dizaine de nanomètres et couplée à une seule nanoantenne.

Cette nanostructure a été fabriquée avec du phosphure de gallium, qui présente un fort indice optique et une faible absorption. Ainsi, seule une très faible portion des photons émis par les molécules est absorbée par la nanostructure, ce qui permet d’en détecter un très grand nombre. Leur taux d’émission est jusqu’à trente fois plus grand qu’en l’absence de la nanoantenne. Comme la réponse à cette interaction est mesurée pour des molécules situées à différents endroits par rapport à la nanostructure, la méthode permet de cartographier l’interaction lumière-matière avec une résolution nanométrique. La méthode, dite de single-molecule fluorescence lifetime imaging microscopy (smFLIM), est basée sur le même principe que les techniques dites de super-résolution, largement appliquées à des études de biophysique et récompensées par le prix Nobel de chimie de 2014.

La résolution spatiale et la dynamique temporelle ouvrent de nouvelles voies pour la caractérisation de dispositifs optiques hautement sensibles. Elles nous permettent aussi de comprendre plus en profondeur quels sont les moyens d’améliorer l’interaction d’un émetteur quantique avec une nanostructure. L’équipe teste à présent ces résultats sur des nanostructures plasmoniques, c’est-à-dire métalliques, fabricables à large échelle et aux propriétés optiques remarquables. Ces travaux permettent d'enfin caractériser de tels systèmes, particulièrement complexes.

Nanophotonique : les interactions lumière-matière mesurées à l’échelle de la molécule unique
Représentation d’un émetteur unique entre deux nanoantennes diélectriques.
© R. Margoth Córdova-Castro et al.

Références
Single-emitter super-resolved imaging of radiative decay rate enhancement in dielectric gap nanoantennas.
R. Margoth Córdova-Castro, Bart van Dam, Alberto Lauri, Stefan A. Maier, Riccardo Sapienza, Yannick De Wilde, Ignacio Izeddin, and Valentina Krachmalnicoff.
Light: Science & Applications, 13, 7 (2024).

Contact

Valentina Krachmalnicoff
Chargée de recherche CNRS à l’Institut Langevin (CNRS/ESPCI Paris)
Ignacio Izeddin
Maître de conférences à l'ESPCI, Institut Langevin (CNRS/ESPCI Paris)
Communication CNRS Ingénierie