Un microscope à balayage intelligent pour de meilleures observations des feuillets de cellules

Résultat scientifique

Le développement de nouvelles techniques d’imagerie pousse les biologistes à réaliser des observations toujours plus longues sur les échantillons cellulaires. Or ces derniers sont perturbés lorsqu’ils sont trop exposés à la lumière. Des scientifiques de l’Institut Fresnel ont conçu une méthode qui recherche automatiquement les zones d’intérêts dans l’échantillon, puis y concentre l’observation. Les échantillons d’embryons de mouches du vinaigre reçoivent ainsi jusqu’à cent fois moins de lumière qu’avec des techniques classiques.

La biologie moderne repose sur l’observation des cellules vivantes, rendue possible au sein même d’organismes modèles par les dernières avancées en microscopie optique. Les techniques actuelles sont cependant confrontées à un problème de toxicité dû à l’éclairage nécessaire à l’excitation des marquages fluorescents : une illumination prolongée affecte et ralentit la croissance des cellules. Un phénomène d’autant plus contraignant que les biologistes ne se contentent plus d’images fixes, mais préfèrent des films toujours plus longs et de meilleures résolutions, ce qui augmente nécessairement la durée d’exposition des cellules à la lumière.

Des chercheurs et chercheuses de l’Institut Fresnel (CNRS/Centrale Marseille/Aix-Marseille Université) ont adapté le fonctionnement des microscopes au cas des embryons, où les cellules sont souvent organisées en feuillets selon des surfaces courbées. Plutôt que de balayer un laser point à point dans tout l’espace 3D qui contient l’embryon, ils ont développé un microscope intelligent qui prédit la position des structures d’intérêt des échantillons, afin d’envoyer de la lumière uniquement dans ces zones. Ces résultats sont publiés dans la revue Light: Science & Applications.

Leur technique commence par l’illumination d’une fraction très faible du volume de l’échantillon biologique. Les quelques points ainsi acquis sont analysés de façon statistique et géométrique afin de déterminer la forme globale du feuillet de cellules. Le balayage de l’échantillon peut alors commencer, mais en restant autour de cette surface. De plus, afin de concentrer le balayage sur les contours fluorescents des cellules, des algorithmes permettent de prédire localement les zones à illuminer, puis de propager la recherche d’autres zones d’intérêt dans leur voisinage. L’équipe a appliqué ces travaux à l’observation d’embryons de drosophiles, ou mouches du vinaigre, avec une irradiation lumineuse jusqu’à cent fois plus réduite qu’avec un microscope confocal classique.

Cette méthode ouvre une nouvelle voie pour imager, sur de longues périodes, le comportement d’objets très fragiles tels que les embryons et les organoïdes. Très générale, cette approche pourrait être adaptée à de nombreux microscopes commerciaux déjà présents dans les installations d’imagerie des instituts de biologie. Un brevet est en cours de dépôt.

À gauche : tissu biologique courbe où les hexagones représentent les contours fluorescents des cellules organisées en feuillet cellulaire. Le tissu peut être recouvert par un second épithélium qui sera écarté par le processus d’imagerie.  À droite : à partir de quelques acquisitions (points verts), le microscope estime automatiquement la surface du tissu (maille rouge) et peut alors concentrer les acquisitions sur cette surface.
À gauche : tissu biologique courbe où les hexagones représentent les contours fluorescents des cellules organisées en feuillet cellulaire. Le tissu peut être recouvert par un second épithélium qui sera écarté par le processus d’imagerie.
À droite : à partir de quelques acquisitions (points verts), le microscope estime automatiquement la surface du tissu (maille rouge) et peut alors concentrer les acquisitions sur cette surface.

Références
An adaptive microscope for the imaging of biological surfaces.
Abouakil, F., Meng, H., Burcklen, MA. et al.
Light Sci Appl 10, 210 (2021). https://doi.org/10.1038/s41377-021-00649-9

Article disponible sur la base d’archives ouvertes HAL.

Contact

Loïc Le Goff
Chargé de recherche CNRS, Institut Fresnel (CNRS/Centrale Marseille/Aix-Marseille Université)
Frédéric Galland
Chargé de recherche CNRS, Institut Fresnel (CNRS/Centrale Marseille/Aix-Marseille Université)
Communication CNRS Ingénierie