Un piégeage de particules grâce au mouvement brownien

Résultat scientifique Mécanique des fluides

Le mouvement brownien autour des particules provoque souvent des interférences, mais peut aussi se révéler utile. Une équipe internationale a montré que lorsqu’une particule est envoyée vers un obstacle cylindrique, il se forme une zone sans perturbations dans laquelle le mouvement brownien peut envoyer la particule. Elle y est alors temporairement piégée. Publiés dans la revue Science Advances, ces travaux pourraient trouver des applications en microfluidique.

Le mouvement brownien décrit la trajectoire aléatoire que prend une particule à cause de l’agitation des autres particules présentes. Ce phénomène explique par exemple pourquoi de petits éléments censés rester immobiles vont se mettre à bouger, alors qu’aucune force extérieure ne leur donne l’énergie nécessaire. Il est à l’inverse rarissime que le mouvement brownien conduise à l’arrêt d’une particule déjà en déplacement. Des chercheurs et chercheuses du Laboratoire d’hydrodynamique (LadHyX, CNRS/École Polytechnique), de l’université Northwestern (États-Unis), du laboratoire national d’Argonne (États-Unis) et du centre basque en mathématiques appliquées (Espagne) ont cependant montré que le mouvement brownien peut participer à la capture de particules qui entrent en contact avec un obstacle cylindrique. Elles se retrouvent alors temporairement immobilisées à l’arrière du cylindre.

L’équipe a utilisé des particules sphériques d’un à deux microns de diamètre, composées de polymères et d’un aimant en son centre. Cet élément permet de faire tourner la particule sur elle-même grâce à l’action de champs magnétiques, sans quoi le piégeage ne peut pas avoir lieu. Après une série de simulations et d’expériences, les scientifiques ont pu expliquer le phénomène. En se déplaçant et en tournant sur elle-même, la particule induit des écoulements dans le fluide environnant, ici de l’eau légèrement salée. Ils provoquent l’apparition de poches où le milieu stagne, dont une qui se situe à l’arrière de l’obstacle cylindrique. Ce piège n’est cependant pas sur la trajectoire naturelle de la particule. Si elle est suffisamment petite pour être perturbée par le mouvement brownien, elle a alors une chance qu’il la pousse dans cette zone calme où elle sera temporairement capturée. Sinon, elle va simplement contourner l’obstacle et poursuivre sa course. La particule n’entre pas systématiquement dans cet espace, mais plus la manœuvre est répétée et plus les probabilités que la particule y soit piégée se lissent. De même, plus l’obstacle est grand par rapport à la particule et plus le piégeage est long et efficace. Publiés dans la revue Science Advances, ces travaux pourraient être exploités pour le piégeage et le triage dans des systèmes microfluidiques et d’administration de médicaments, qui reposent tous deux sur la navigation de microparticules dans des paysages complexes et structurés.

Un piégeage de particules grâce au mouvement brownien
La trajectoire de la particule face à un obstacle cylindrique, vu du dessus. La trajectoire initiale est en bleue, le moment du piégeage en vert et la suite de la course en jaune.
© Blaise Delmotte

Références
A simple catch: Fluctuations enable hydrodynamic trapping of microrollers by obstacles.
Ernest B. van der Wee, Brendan C. Blackwell, Florencio Balboa Usabiaga, Andrey Sokolov, Isaiah T. Katz, Blaise Delmotte, Michelle M. Driscoll.
Science Advances, volume 9, issue 10, 2023.
https://doi.org/10.48550/arXiv.2204.04995
Article consultable sur les bases d’archives ouvertes Arxiv et HAL

Contact

Blaise Delmotte
Chargé de recherche CNRS au Laboratoire d’hydrodynamique (LadHyX, CNRS/École Polytechnique)
Communication CNRS Ingénierie