Une cartographie des états électroniques du graphène

Résultat scientifique Génie électrique et électronique

Les états électroniques des cristaux contrôlent la majorité de leurs propriétés, mais, selon les échelles, ils restent souvent difficiles à observer. Dans le cadre d’une collaboration internationale, des scientifiques du laboratoire Matériaux ingénierie et science ont développé une méthode permettant de cartographier les états électroniques du graphène. Publiés dans Physical Review Letters, ces travaux reposent sur des modèles numériques et un microscope électronique en transmission.

Les matériaux cristallins présentent une structure régulière maintenue par des liaisons chimiques. Ces liaisons peuvent se retrouver dans différents états électroniques qui gouvernent la plupart des propriétés physiques et chimiques des matériaux cristallins. Les états électroniques au niveau des défauts, des interfaces et des surfaces influencent quant à eux les propriétés macroscopiques du cristal, rendant essentielle la connaissance de ces états électroniques. Des chercheurs et chercheuses du laboratoire Matériaux ingénierie et science (MATEIS, CNRS/INSA Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1), du laboratoire SuperSTEM (Royaume-Uni), des universités de Leeds et d’York (Royaume-Uni), de l’université de technologie de Vienne (Autriche) et de l’université de Virginie-Occidentale (États-Unis) sont parvenus à cartographier les états électroniques de couches de graphènes par spectroscopie de perte d’énergie des électrons, une technique fonctionnant dans un microscope électronique en transmission. Jusqu’ici, ces données étaient noyées dans du bruit et des artefacts liés à la technique de mesure.

Le graphène a été choisi comme modèle car ses propriétés et ses caractéristiques spectrales sont bien connues. Les scientifiques se sont ici focalisés sur un échantillon constitué de plusieurs feuillets de graphène empilés et faiblement liées entre eux. Ils ont développé une approche qui repose sur des calculs numériques et des données expérimentales, prises dans un microscope électronique en transmission, à partir de laquelle des cartes d’états électroniques peuvent être interprétées en termes d’orbitales atomiques. L’équipe a ainsi pu distinguer et enlever les contributions de la propagation du faisceau d’électron, dues entre autres à l’épaisseur de l’échantillon, néfastes à l’interprétation du contraste. Elle a ainsi obtenu une cartographie précise des états électroniques du graphène. Ces travaux présentent un important intérêt méthodologique pour la compréhension du rôle des liaisons chimiques aux interfaces et aux défauts dans les solides, et ainsi favoriser la création de nouveaux matériaux destinés par exemple à la microélectronique du futur, qui mise beaucoup sur les propriétés du graphène.

À gauche, une cartographie des états électroniques à l’échelle du nanomètre. Les ronds verts correspondent à la position des plans atomiques par rapport au signal du microscope électronique en transmission (HAADF). À droite, le profil des états électroniques et du signal HAADF. © Bugnet et al.
À gauche, une cartographie des états électroniques à l’échelle du nanomètre. Les ronds verts correspondent à la position des plans atomiques par rapport au signal du microscope électronique en transmission (HAADF). À droite, le profil des états électroniques et du signal HAADF. © Bugnet et al.

Références
Imaging the spatial distribution of electronic states in graphene using electron energy-loss spectroscopy: prospect of orbital mapping.
M. Bugnet, M. Ederer, V. K. Lazarov, L. Li, Q. M. Ramasse, S. Löffler, and D. M. Kepaptsoglou.
Physical Review Letters, 128, 116401 (2022).

doi.org/10.1103/PhysRevLett.128.116401
Article disponible sur la base d’archives ouvertes HAL

Contact

Matthieu Bugnet
Chargé de recherche CNRS au laboratoire Matériaux ingénierie et science (Mateis, CNRS/INSA Lyon/Université Claude Bernard)
Communication CNRS Ingénierie