Une imagerie simultanée de l’orientation et de la position 3D de molécules fluorescentes

Résultat scientifique Photonique

Idéale pour observer le fonctionnement des cellules, l’imagerie super-résolue peine cependant à fournir à la fois la position et l’orientation des molécules uniques qu’elle scrute. Grâce à l’emploi d’une lame de verre aux propriétés spécifiques, des chercheurs et des chercheuses de l’Institut Fresnel et de l’Université de Rochester ont combiné avec succès les deux mesures. Publiés dans la revue Nature Communications, ces travaux aideront en particulier à l’étude de l’organisation des protéines dans les cellules à des échelles nanométriques.

L’imagerie super-résolue permet, à partir de la fluorescence, de donner la position 3D d’une molécule avec une précision d’une dizaine de nanomètres. Cette technique est particulièrement utilisée en biologie, par exemple pour observer les assemblages dynamiques de protéines à l’intérieur des cellules, car, contrairement à d’autres approches, elle ne demande pas de traitements incompatibles avec la survie des cellules. L’imagerie super-résolue tire les informations sur la position des molécules grâce au pointé du centre de l’image de leur réponse optique, une tache de diffraction circulaire d’un diamètre de quelques centaines de nanomètres. Mais si on essaye d’en extraire également l’orientation de la cible, cette information est mélangée avec les données de localisation dans l’espace. Des chercheurs et des chercheuses de l’Institut Fresnel (CNRS/Centrale Marseille/Aix-Marseille Université), en collaboration avec l’Université de Rochester (USA), sont parvenus à extraire, de manière non ambiguë et simultanée, l’orientation 3D et la position d’une molécule, grâce à une lame de verre capable de traiter efficacement le signal optique d’une cible fluorescente.

L’équipe a utilisé une lame biréfringente spatiale à symétrie trigonale, fabriquée en appliquant des presses métalliques en trois points d’une plaque de verre circulaire. Ces contraintes font apparaître dans le matériau des motifs de déformation très bien contrôlés, qui permettent de modifier localement à la fois la phase et la polarisation de la lumière issue des cibles fluorescentes. Cette lame était déjà employée pour étudier la polarisation de la lumière, avant d’être testée avec succès dans le cadre de l’imagerie super-résolue. Cette méthode, appelée coordinate and height super-resolution imaging with dithering and orientation (CHIDO), a été appliquée à la mesure de l’orientation et de la position de molécules uniques attachée à des filaments d’une protéine, la F-actine. Les molécules ont montré qu’elles étaient en moyenne orientées dans la direction des filaments, bien que leur orientation individuelle fluctue de manière non négligeable. Elles deviennent ainsi des rapporteurs de l’orientation 3D de la F-actine, et par conséquent de son organisation dans les cellules aux échelles nanométriques, même dans des réseaux denses et complexes. Ce type d’informations, que l’on ne peut pas encore obtenir avec un microscope optique, intéresse de nombreux travaux de biologie.

Imagerie de l’orientation 3D et de la position 3D de molécules uniques attachées à un filament de F-actine, reconstruit in vitro sur une surface de verre. À gauche : l’image noir et blanc est l’image directe produite par toutes les molécules du filament. Les cônes représentent l’orientation (direction de pointé du cône), la fluctuation angulaire (ouverture angulaire du cône), et leur hauteur (couleur). À droite : exemple d’image d’une molécule unique projetée sur deux polarisations circulaires gauche et droite (haut) et son ajustement théorique (bas). © Curcio et al.
Imagerie de l’orientation 3D et de la position 3D de molécules uniques attachées à un filament de F-actine, reconstruit in vitro sur une surface de verre. À gauche : l’image noir et blanc est l’image directe produite par toutes les molécules du filament. Les cônes représentent l’orientation (direction de pointé du cône), la fluctuation angulaire (ouverture angulaire du cône), et leur hauteur (couleur). À droite : exemple d’image d’une molécule unique projetée sur deux polarisations circulaires gauche et droite (haut) et son ajustement théorique (bas).
© Curcio et al.

Références
Birefringent Fourier filtering for single molecule coordinate and height super-resolution imaging with dithering and orientation.
V. Curcio, L.A. Alemán-Castañeda, T.G. Brown, S. Brasselet & M.A. Alonso.

Nature Communications volume 11, Article number:Nat Commun 11, 5307 (2020).
https://doi.org/10.1038/s41467-020-19064-6

Contact

Sophie Brasselet
Directrice de recherche CNRS à l’Institut Fresnel (CNRS/Centrale Marseille/Aix-Marseille Université)
Miguel Alonso
Professeur au sein de la chaire d’excellence AMIDEX et chercheur à l’Institut Fresnel (CNRS/Centrale Marseille/Aix-Marseille Université)